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Fly North !

Il était une fois, le Cap Nord...

Que je le dise tout de suite avant que le suspens devienne insoutenable, non, malheureusement, nous n'avons pas volé dans un Rafale de l'armée de l'air, quoi que cela eut été théoriquement possible dans la mesure où ils ont 2 places, contrairement à ceux de l'aéronavale. Mais, je m'égare. Je reviendrai dans le post suivant sur cette belle opportunité...

Nous sommes donc à Kiruna et en raison de l'exercice conjoint de plusieurs nations en Scandinavie, nous sommes contraints à un décollage assez tôt. En effet, du 22 mai au 2 juin, comme tous les 2 ans, la Norvège, la Suède et la Finlande organisent le Arctique Challenge Exercise qui réunit plusieurs forces aériennes membres de l'OTAN sur des espaces aériens qui leurs sont dédiés pour plusieurs jours.

Nos navigations traversent ces espaces et nous devons donc tenir compte des horaires et des espaces pour respecter les SUP AIP qui ont été publiés. L'exercice commençant à 9 heures LT et notre temps pour quitter la zone concernée étant de 15 minutes, nous décollerons, prévenants, à 8h20.

Pas de temps donc pour petit déjeuner dans le petit chalet qui nous sert de chambre d'hôtel, nous mangerons notre breakfast package préparé par l'hôtel au pied de l'avion avec 0°... :)

La préparation du vol et celle de l'avion se font comme les autres jours avec une attention toute particulière à la météo. Certaines habitudes s'installent et la répartition des rôles dans la réalisation des navigations, des contrôles pré-vol et dans l'installation dans le cockpit facilitent l'abord de chaque vol. Pour ce périple, nous en sommes à notre 6ème vol, totalisant pour l'instant sur les 5 premiers environ 13 heures 20 de vol.

Celui-ci cependant est spécial. La météo sur le Cap Nord et sur la côte ouest de la Norvège n'est pas comme nous l'aurions espéré avec du soleil et un plafond haut. Les METAR des différents terrains annoncent des plafonds plutôt bas, majoritairement Broken (Fragmenté) ce qui veut dire que sur une couverture nuageuse où 8 désigne une couverture nuageuse complètement fermée, l'observation est à 6 ou 7. Il y a donc des trous qui permettent de descendre à travers les nuages après une phase de vol au-dessus (VFR On-Top pour les bilingues) mais ils ne sont pas gros. Les terrains situés à l'ouest proches de la mer sont en conditions de vol à vue mais dégradées du fait d'une visibilité faible et d'un plafond bas, cependant, des terrains situés plus à l'intérieur des Fjords comme Alta présentent des plafonds un peu plus élevés et constituent des déroutements possibles en cas de besoin.

Les prévisions des différents terrains disponibles (TAF pour Terminal Area Forecast) n'indiquent pas de dégradations de la situation dans la journée. Pour Honingsvag (notre terrain de destination), la nébulosité est à BKN 1400 ft avec une visibilité de plus de 10 kilomètres. Nous y allons donc.

Christophe est CDB aujourd'hui. Depuis le départ, nous alternons un vol sur deux. Pour tous les vols, la charge est répartie. Un pilote qui gère le cap, l'altitude et l'avion ; l'autre qui fait les communications, le suivi de nav et les modifications éventuelles.

Le décollage se passe bien et nous faisons route au Nord. Très rapidement, l'enthousiasme lié à la beauté des paysages que nous survolons se mêle à une forme d'anxiété liée à leur inhospitalité. Les reliefs sont peu élevés (moins qu'à l'Ouest) mais ces grandes plaines enneigées et glacées font redouter la panne moteur.

Sweden control est en fréquence et nous sommes suivis radar et sous plan de vol, donc tout va bien. D'abord peu nombreux en dessous de nous, les nuages se font plus présents à une altitude identique à la nôtre. Christophe fait le (bon) choix de passer On Top pour ne pas se retrouver entre les reliefs et les nuages. Au fur et à mesure, les nuages passent au Broken annoncé par les prévisions. Nous observons et cherchons les trouées par lesquelles une descente serait possible, avec un relief favorable en dessous et continuons de veiller l'évolution des conditions météo.

C'est un des points importants. Nous préparons et suivons les vols avec différents outils. L'avion dispose d'un GPS dans lequel nous rentrons nos plans de vol et, dès que cela est possible, nous doublons de routes magnétiques en utilisant les VOR disponibles. Nous utilisons aussi nos iPad et deux applications : SkyDemon dont nous avons l'habitude et Garmin Pilot que je souhaitais tester à l'occasion de ce voyage. Et c'était une bonne idée. La Suède et la Norvège disposent d'une excellente couverture GSM en 3G et 4G même dans ces zones reculées et à une altitude de 5.500 pieds. Grâce à cela et à Garmin Pilot, nous obtenons les mises à jour des observations des différents terrains (METAR) et une vision de la couverture nuageuse ; nous pouvons donc savoir comment évoluent les conditions à l'arrivée et adapter en fonction notre vol.

Nous arrivons bientôt à la frontière finlandaise pour une survol de 10 mn de leur territoire. Sweden control nous informe que c'est Norway control qui réalise l'information de vol par délégation sur ce secteur, nous les contactons donc pour les informer du passage de frontière et solliciter le suivi de vol et là,... Personne. Notre altitude et les reliefs doivent géner la réception radio et nous ne parvenons pas à les contacter. Après 3 essais infructueux, l'équipage d'un avion de ligne qui nous avait entendu propose de relayer notre message à Norway control, ce que nous acceptons bien volontiers... Le message passe et nous recevons un code transpondeur. Cela paraît peut être bête, mais ce relai radio a été un des bons moments de ce vol. Environ 15 minutes plus tard, peu après avoir passé la frontière norvégienne, nous commençons à entendre des voix sur la fréquence et nous parvenons à contacter Norway control.

Le vol se poursuit avec une couverture nuageuse plus dense que les prévisions ne le laissaient imaginer, peu épaisse mais dense et avec une température très proche de zéro. A la verticale d'Alta, nous apercevons le fjord au travers de plusieurs grands trous dans les nuages, nous poursuivons vers Banak.

A l'approche de ce terrain, une belle ouverture dans les nuages nous amène à tenter une descente à travers. Christophe engage la manoeuvre. En dessous, nous voyons de la neige et l'impression de peu d'espace résiduel entre le bas de la couche et le relief ; nous remontons au-dessus et poursuivons avec un cap direct vers la mer pour faciliter la percée à travers les nuages.

Les mises à jour météo que nous recevons confirment celles observées au départ sur Honingsvag et une fois quittées les terres, nous apercevons la mer au travers d'une ouverture dans la couche. Christophe configure l'avion et descend à travers. Nous arrivons sous les nuages à environ 1.500 pieds. La tour de Honingsvag nous annonce les paramètres à l'arrivée ; 17 noeuds de vent du 270°, soit dans l'axe pour la piste 26 et de légères pluies à l'approche.

L'approche sous les nuages bas et la pluie nous amène au large du Cap Nord que nous voyons quasiment à notre niveau sur notre droite, puis nous entrons dans le Kamorfjorden. Du fait du fort vent d'ouest et des reliefs, nous subissons des turbulences importantes. Nous progressons dans le Fjord pour voir au fond le terrain de Honingsvag Valan. L'approche est difficile car la piste est enclavée au fond du fjord. Une fois passé le dernier virage, l'avion descend et se pose sur la piste.

Nous sommes arrivés.

Nous attachons l'avion sur le parking et commençons une nouvelle aventure pour refaire le plein de l'avion. Contrairement aux infos de l'AIP norvégien, ils ne prennent pas la carte bancaire et seulement la carte BP, que nous n'avons pas... L'équipe de piste sur place est très sympa et nous accueille au chaud et à l'abri du vent ! Une collaboratrice efficace d'Air BP nous débloquera la situation au bout d'une heure et nous pourrons refaire le plein.

Une question reste cependant en suspens ; que faisons nous maintenant ?

Pendant que Christophe fait le plein avec les gars d'Avinor, je regarde les prévisions météo. La suite de notre voyage doit nous amener vers l'ouest de la Norvège, Hammerfest puis les îles Lofoten, puis Trondheim et Bergen. Les METAR et les TAF de tous ces terrains indiquent des plafonds bas voire des conditions de vol aux instruments. Par ailleurs, le vent sur Honingvag est annoncé tourner au Nord sans faiblir, ce qui accentue le vent de travers sur le terrain. Pour finir, la météo évoque de la neige fondue pour la fin de matinée du lendemain...

Après tous les vols réalisés, le dilemme est le suivant : les conditions météo font objectivement obstacle à un programme de vols à l'ouest de la Norvège et le vent + les précipitations annoncées à un départ le lendemain du Cap Nord. Par contre, les plafonds annoncés sur un aéroport voisin à LAKSEL et le beau temps sur la Finlande qui, par ailleurs, a une topographie beaucoup plus accueillante (toutes les altitudes de sécurité sont inférieures à 3.000 pieds) permettent d'envisager un départ dans l'après midi, avec un vol idéalement On-Top si on peut passer au-dessus ou sinon en dessous avec la possibilité de se poser à LAKSEL si ça ne passe pas. Avec les infos disponibles, nous prenons la décision de la sécurité : renoncer à la Norvège et aller en Finlande.

Le temps de préparer la navigation, nous déposons le plan de vol et nous décollons direction la Laponie finlandaise et l'aéroport du père noël : Rovaniemi (EFRO). Nous retrouvons l'exercice Arctic Challenge sur notre route et devons l'éviter.

C'est moi qui pilote au départ de Honningsvag ; le vent est légèrement plus travers qu'à l'arrivée et avec la même force. Après le décollage, Christophe propose que nous passions verticale de la piste pour rejoindre le fjord de l'autre côté pour éviter de survoler le Kamorfjorden car la visibilité n'est pas géniale. Le passage verticale entre deux reliefs est l'occasion de turbulences assez fortes qui cessent dès que nous arrivons au dessus de la mer. Très rapidement, une ouverture dans la couche, nous permet de passer On-Top, en route vers la Finlande.

Le vol est calme. Les nuages en-dessous sont denses mais la couche peu épaisse. Au-dessus, c'est moins bleu que lors du vol précédent avec des nuages d'altitudes à 17.000 pieds. Les prévisions sur le terrain d'arrivée sont Broken 5.700 pieds mais nous avons 2 déroutements possibles et proches où le ciel est tout bleu sans nuages.

La fin du vol se passe bien. Nous descendons sous les nuages à peu près travers de l'aéroport de Kittilä puis le ciel se dégage peu à peu. A l'approche de Rovaniemi, nous entendons des chasseurs sur la fréquence et réalisons que cet aéroport mixte militaire / civil doit accueillir une partie des 100 avions réunis pour ACE 2017. Et c'est le cas ! Sur la droite de la piste, pendant la finale nous apercevons un parking plein d'avions de chasse, dont des mirages 2000 et des rafales.

C'est la fin d'une longue et éprouvante journée.

Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
Il était une fois, le Cap Nord...
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